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Laurent Champaney, Directeur général d'Arts et Métiers et Président de la commission diversité de ParisTech

Arts et Métiers

Date de publication : 14/10/2020
Diversité
Vie de ParisTech

#Newsletter n°8 : La diversité est une force pour ParisTech

Entretien avec Laurent Champaney, Directeur général d'Arts et Métiers et Président de la commission diversité

 

Vous êtes président de la commission diversité de ParisTech depuis un an, comment abordez-vous cette question ?

Ce qui rassemble les établissements de ParisTech, c’est la formation d’ingénieur généraliste de haut niveau. Les étudiants sont formés dans un environnement de recherche français et international et vont être amenés à occuper des postes de direction. Ils vont piloter des organisations humaines et vont très certainement devoir faire face à des problématiques liées à la diversité avec tout le bien et les difficultés que cela peut générer.

Les grandes écoles de ParisTech préparent les jeunes à travailler dans les entreprises. Il est essentiel que la gestion de la diversité fasse partie intégrante de la formation des étudiants pour qu’ils soient capables, une fois en poste, d’entretenir et de gérer la diversité dans leurs organisations. La question qui guide nos actions au sein de la commission diversité est : comment organiser et gérer la diversité dans nos écoles ? Nous sommes bien conscients qu’il reste beaucoup de chemin à parcourir. Nous avançons petit à petit.

 

Quels sont vos principaux enjeux en matière de diversité ?

Toutes les formes de la diversité : la diversité sociale, la diversité culturelle (langues et origines ethniques), la diversité liée au handicap et la diversité liée au genre et à l’orientation sexuelle. Nous avons beaucoup oeuvré pour faire en sorte que cette diversité soit réelle, en particulier dans nos recrutements. Nous travaillons pour amener de la diversité culturelle en recrutant beaucoup d’étudiants internationaux et nos actions menées dans ce sens portent leurs fruits. Nous avons en moyenne 30% d’étudiants internationaux. Nous souhaitons amener de la diversité sociale en faisant connaître davantage nos formations aux lycéens et aux collégiens, en essayant de susciter des vocations, en proposant des financements et des aides aux étudiants qui en ont le plus besoin.

Au travers de nos actions, nous essayons aussi d’attirer plus de filles vers les carrières d’ingénieurs. Notre premier enjeu est donc de développer la diversité car elle nous enrichit et le second est de garantir son respect et sa bonne appréhension.

 

Quelles actions avez-vous mises en place au sein de ParisTech et des écoles ?

Depuis mon arrivée, nous avons poursuivi les actions mises en place pour entretenir la diversité dans nos écoles. En 2019, un atelier sur l’égalité femmes-hommes a été organisé par notre commission diversité pour réfléchir à des actions à mettre en place pour répondre au harcèlement sexuel.

Il est essentiel de construire un écosystème qui soit bienveillant et dans lequel les victimes puissent se sentir écoutées et en sécurité. Ces réflexions ont nourri la réalisation d’un « kit actions contre le harcèlement sexuel ». Dans le cadre d’un autre atelier qui a eu lieu juste avant le confinement, nous avons réuni des étudiants, des personnels administratifs et des enseignants-chercheurs pour identifier quelles sont les problématiques liées à la diversité qu’ils ont rencontrées. Les étudiants qui ont participé à cette réflexion reflétaient la diversité : des femmes et des hommes, des étudiants internationaux et français, des étudiants LGBT, des étudiants porteurs de handicap. Certains avaient pris le soin de faire des enquêtes auprès de leurs camarades. Les propositions recueillies sont venues enrichir le plan d’action diversité de chaque école.

D’autre part, les Cordées de la Réussite représentent un pan important de l’action de ParisTech en matière de diversité car elles permettent à des jeunes issus de divers milieux socio-culturels de mieux connaître notre offre de formation et les dispositifs mis en place pour y accéder. Nous organisons d’ailleurs une nouvelle Cordée de la Réussite avec le lycée Pierre-Gilles de Gennes avec la coopération de Chimie ParisTech, AgroParisTech et Arts et Métiers.

Enfin, nous sommes actuellement en train de monter une chaire sur la diversité.

 

Quelles sont les pistes pour ouvrir plus largement les écoles à des élèves de tous horizons sociaux ?

Ce qui est compliqué, c’est que les écoles recrutent majoritairement leurs étudiants via les Classes Préparatoires aux grandes écoles (CPGE), c’est un vivier dans lequel il n’existe pas une grande diversité. Nous l’enrichissons avec des recrutements en parallèle et des recrutements à l’international, mais ce n’est pas encore suffisant. Il faut aller plus loin. La question qu’il faut se poser, c’est comment bien informer les jeunes avant les CPGE ? Comment les convaincre du fait qu’ils ont les capacités pour s’orienter vers les écoles quels que soient leur origine sociale ou leur genre ?Comment faciliter l’accès des filles aux carrières d’ingénieur est aussi une vraie question. C’est un travail de fond car il faut communiquer dans les collèges et les lycées et il y a beaucoup d’élèves. Je pense à l’association « Elles bougent » qui fait un travail énorme dans ce sens-là.

La mise en place de Cordées de la Réussite, en coopération avec différents établissements du secondaire, est un axe majeur de notre action. Je crois beaucoup à l’idée de modèle. Le témoignage des étudiants de nos écoles est primordial pour montrer aux plus jeunes que les étudiants de ParisTech sont des jeunes « normaux » et qu’ils sont issus de tous horizons. Souvent, les écoles de ParisTech souffrent d’un stéréotype. On pense qu’il n’y a pas de diversité alors qu’elle est bien présente. L’apprentissage favorise la diversité au sein de nos écoles. Mais avant d’arriver chez nous, les jeunes ne savent pas qu’on peut faire de l’apprentissage. Il faut miser sur la communication. Les témoignages de nos étudiants apprentis sont essentiels.

 

La presse s’est fait l’écho récemment de cas de harcèlement dans les établissements d’enseignement supérieur. Comment traitez-vous ce sujet ?

C’est un sujet compliqué et il faut admettre qu’effectivement, il touche peut-être plus les écoles que les grandes universités. Cette réalité peut s’expliquer par le fait que l’environnement des écoles est plus confiné : il y a un esprit de promotion, la vie des étudiants s’organise en majeure partie sur les campus. Un environnement qui est hélas plus favorable à ces problèmes de harcèlement.

L’enjeu est d’informer et de former les étudiants pour qu’ils soient plus sensibles à ces questions-là. Je pense qu’il faut également faire ce travail sur nos anciens élèves pour leur faire comprendre que certains comportements/actes qui ont pu avoir lieu au cours de leurs études n’étaient pas admissibles. Outre l’information et la formation, il y a bien entendu le côté sanction : ne pas laisser passer les choses parce que c’est « habituel » ou que c’est « admis ».

 

Vous avez évoqué précédemment, un projet de chaire de la diversité, pouvez-vous nous en dire plus ?

L’idée de la chaire est de se questionner sur « comment former de futurs managers à la diversité ? ». Les entreprises ont des environnements similaires à celui des écoles, des environnements plutôt confinés. Elles cherchent à entretenir la diversité car c’est bon pour elles, mais elles font face à des problématiques diverses. Elles essaient aussi de former et d’informer leurs collaborateurs, mais les attendus et les perceptions évoluent très vite et elles ont parfois des outils de formation inadaptés et surtout peu adaptés aux nouvelles générations.

Dans le cadre de cette chaire, nous proposerons aux entreprises participantes de tester leurs outils de formation sur nos étudiants qui sont les managers de demain, dans un écosystème qui ressemble aux leurs : nos écoles. Ce dispositif est bénéfique pour les entreprises et pour nos jeunes qui sont davantage stimulés et inclus dans une vraie réflexion sur la diversité. Un référent de chaque entreprise sera présent pour analyser l’utilisation des outils de formation par les étudiants et leurs réactions. Si les formations et les mises en situation ne sont pas adaptées, des changements seront proposés et la nouvelle version de la formation sera testée dans le même environnement l’année d’après.

Cette chaire peut rassembler des entreprises qui viennent de milieux différents car les écoles de ParisTech ont des spécialités différentes. Cela nous permettra de traiter plusieurs thématiques et affinera nos réflexions sur le sujet. Avec cette chaire, nous allons amener la diversité des écoles et des entreprises à s’exprimer.

 

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